AAP , Journée d’étude : « Voisinages en Asie : enjeux politiques, mobilisations, pratiques sociales »

INALCO, Paris, prévue pour fin janvier 2021
La date de la journée sera précisée ultérieurement
nouvelle date limite d’envoi des propositions : 27 juin 2020 (voir ci-dessous)

Organisée par l’équipe Populations japonaises (IFRAE – CRCAO)

Le voisinage perd-il son importance et son rôle dans un contexte de mondialisation et d’évolution technologique ? Quels sont les impacts des changements sociaux sur les rapports de voisinage ? Existerait-il des spécificités dans les pays d’Asie ? Loin de s’être intégralement dissoute dans le contexte de l’accroissement contemporain des mobilités, la question des
rapports de voisinage apparaît comme un thème d’étude riche et vivace. Les discussions sur cet objet d’étude transversal se retrouvent ainsi dans des disciplines variées telles que la sociologie, l’anthropologie, l’histoire, la géographie et les sciences politiques : nous pouvons par exemple
citer les recherches en rapport avec le quartier (Authier, Bacqué & Guérin-Pace, 2007 ; Yatabe,
2007 ; Tissot, 2011), avec l’administration locale ou la démocratie (Putnam 1993 ; Le Bart &
Lefèvre 2005) ainsi qu’avec la question de la décroissance urbaine (Fol & Cunningham-Sabot
2010 ; Buhnik, 2015).

Dans le prolongement de ces travaux, cette journée d’étude vise à créer un lieu
d’échange entre chercheurs d’un objet d’étude au croisement de plusieurs disciplines. La notion
de voisinage s’apparente en effet à un « concept fluide » (Forrest, 2007), qu’elle dénote un
découpage administratif, une conception liée à un processus de participation tel qu’un comité
de quartier, ou enfin une catégorie socialement construite dans le temps par les pratiques des
résidents (Ibid.). Les relations vicinales peuvent dès lors s’avérer très variées : il conviendra
d’en cerner et d’en sérier les contours, pouvant recouvrir des entités plus ou moins larges telles
que l’arrondissement et le centre-ville, mais également des rapports microlocaux noués dans la
rue ou au sein de la résidence (Authier, 2008).

L’enjeu de cette journée d’étude consiste à croiser les analyses sur la manière dont
évoluent les liens de voisinage dans les pays d’Asie, dans un contexte où les évolutions
démographiques dessinent, dans le cas de l’Asie de l’Est, comme une « modernité compressée »
(Chang 2010), qui s’accompagne d’intenses changements sur les plans économique, social et
culturel. Il sera également intéressant de réfléchir aux transferts de modèles entre pays, qui
peuvent être en rapport avec l’histoire coloniale (Yoshihara, 2000). Il s’agira donc notamment
de mettre en question les discours portant sur les spécificités culturelles tels que le groupisme
ou la réduction aux traditions propres à un pays. Enfin, nous nous intéresserons aux rapports
des riverains aux autorités publiques, ainsi qu’au sein des communautés de voisins elles-mêmes,
en considérant les formes de mobilisation de la société civile observables dans ce cadre.

Deux dimensions retiendront particulièrement notre attention : 1) les divers enjeux
politiques sous-tendus par le voisinage, mettant en lumière les rapports de pouvoir qui existent
entre national et local, 2) les interactions sociales et économiques afférentes, en lien notamment
avec l’inscription locale du classement social, voire avec leurs représentations dans l’art et la
littérature à travers la figure du voisin. Des contributions provenant de différentes disciplines
sont ainsi les bienvenues.

Axe 1 : Organisations locales et rapports aux pouvoirs

Cet axe interroge en premier lieu les rapports de pouvoir entre national et local, liés
notamment à la notion de gouvernance, à sa critique ainsi qu’aux différentes formes de
mobilisations et de mouvements sociaux au niveau local. Il vise à examiner le rôle du voisinage
en matière politique ainsi que la place des habitants dans les rapports de force qui se réalisent à
l’échelle locale. Pour ce faire, il apparaît primordial de ne pas réduire une telle question à
l’allégation d’une spécificité culturelle non plus qu’à la négation du rôle des organisations de
voisinage.

En effet, au Japon, les recherches menées sur les communautés de quartier appelées
chōnaikai ou jichikai ont eu tendance à souligner deux principaux aspects (Yoshihara, 2000) :
d’une part, elles comprennent ces organisations comme allant à l’encontre de la modernisation
et de l’urbanisation, notamment en raison de leur proximité avec les autorités locales et parce
qu’elles accordent plus d’importance à la hiérarchisation plutôt qu’à l’autonomie des individus ;
d’autre part, certaines explications ont mis l’accent sur la spécificité culturelle, qui conduirait
les Japonais à agir en contraste avec la théorie de l’urbanisme de Wirth (1938) prévoyant la
diminution croissante des relations liées aux groupes de proximité. Or, nous pouvons constater,
qu’existe dans d’autres pays d’Asie, des communautés de quartier comparables, composées de
riverains cherchant à résoudre les problèmes locaux ainsi qu’à promouvoir l’attractivité de leur
quartier.

Ainsi, envisager une perspective plus large, incluant plusieurs pays asiatiques, permet
d’approfondir les réflexions sur la démocratie locale, en rapport avec les jeux de pouvoirs entre
riverains et autorités publiques, l’impact du changement démographique (Pinet, 2018), le rôle
des habitants dans les services locaux (sociaux, sanitaires, juridiques et scolaires). Il est
intéressant d’analyser la manière dont les quartiers s’avèrent construits à travers les relations et
oppositions entre acteurs, en abordant les inégalités spatiales (Peyvel & Gibert, 2018). La
réflexion peut également porter sur la manière dont des concepts provenant d’autres pays se
trouvent traduits (Hassenteufel & Maillard, 2013), à l’instar de la notion de « community ».

Axe 2 : Interactions sociales et économiques

Cet axe interroge notamment des classements sociaux et/ou des catégorisations ethnoraciales à l’œuvre au niveau du voisinage, en mettant en rapport la question des inégalités
sociales avec celle des changements urbains. Il s’agit donc d’analyser les formes de réciprocité
ou de non-réciprocité observables dans l’échange vicinal, mais aussi les phénomènes
d’isolement, de repli sur soi ou d’exclusion, ainsi que les stratégies de distinction des catégories
supérieures (Paugam et al., 2017).

Nous pourrons, dans ce cadre, considérer les effets du lieu de vie sur les réseaux des
riverains ainsi que la construction de l’identité sociale (Guérain-Pace, 2007). Seront également
prises en compte les initiatives publiques ou privées, visant à promouvoir l’entraide ou la
mobilisation au niveau du voisinage, encourageant la lutte contre les phénomènes d’exclusion,
mais également les mécanismes participant à des catégorisations de populations.

Dans le prolongement de ces réflexions, nous pourrions également nous intéresser aux
figures du voisin dans les arts et dans la littérature. Car le voisin, si proche, peut s’avérer, à bien
des égards, un inconnu. C’est cette dialectique du proche et du lointain, ce portrait d’un « autrui
qui n’est pas tout à fait anonyme puisque je sais qu’il habite là » (Drulhe, Clément, Mantovani
et al., 2007) qu’il pourrait être intéressant d’explorer, en mettant en évidence sa fécondité
littéraire ainsi que la portée sociale voire politique des œuvres concernées. Les pistes
d’exploration apparaissent ici ouvertes tant en matière de corpus d’étude qu’en termes
d’approche critique.

Candidature et calendrier

Cette journée vise à constituer un lieu d’échanges entre discipline, pour les chercheurs
s’intéressant aux dimensions socio-spatiales dans divers contextes politiques, sociaux,
juridiques, géographiques et historiques de l’Asie. Les contributions de différentes disciplines
sont ainsi les bienvenues, et pourront constituer les bases d’une réflexion commune autour d’un
objet transdisciplinaire, dont les contours demeurent à appréhender.

Les propositions compteront de 3 000 à 4 000 signes (tout compris) et devront présenter
l’objet étudié, sa problématisation, les matériaux exploités et les modalités de leur production
et de leur analyse.

Elles devront être envoyés avant le 27 juin, sous un format modifiable (docx, odt, rtf),
par courriel à l’adresse suivante : jdevoisinage@gmail.com. Les candidat.e.s seront informé.e.s
au plus tard le 10 juillet de la réponse du comité.

Comité scientifique
Jean-Michel Butel (IFRAE/INALCO)
Sébastien Colin (IFRAE/INALCO)
Marie Gibert-Flutre (CESSMA/Université de Paris)
Hui-Yeon Kim (IFRAE/INALCO)
Isabelle Konuma (IFRAE/INALCO)
Comité d’organisation
Naoko Tokumitsu-Partiot (INALCO)
Jean-Michel Butel (INALCO)

Contact

Naoko Tokumitsu-Partiot : naoko.partiot@inalco.fr

PDF - 163.8 kio
AFFICHE